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* * * l’accident du 27 mars 1970 * * *

Comme on le sait, c’est le prétexte de l’accident survenu il y a exactement 39 ans que le service public a été interrompu dans la vallée d’Aspe. Pas assez rentable ! Et ceci pour un manque de modernisation, en particulier de l’alimentation électrique de la ligne. 39 ans après, la question électrique est encore à l’ordre du jour, nous en avons parlé dans une prise de position, nous faisons part ici d’un message que nous avons reçu qui nous montre que certains points peuvent encore être discutés.

Ci-contre, la locomotive au pont de l’Estanguet

Aujourd’hui, les circonstances de l’accident sont souvent oubliées, c’est donc l’occasion de les rappeler. De toutes les relations de que nous ayons, celle exposée par Nicolas Quierzy est la plus explicite dans sa concision, nous en donnons ici un extrait :

Un accident mémorable !

Le vendredi 27 mars 1970, un train de neuf wagons chargés de maïs quitte la gare de Pau à destination de Canfranc. Il est tracté par deux BB Midi : la 4227 et la 4235. Le convoi dépasse la gare de Lescun-Cette-Eygun et attaque une rampe à 35 pour mille. Mais ce matin-là, il fait froid dans la vallée d’Aspe et la sous-station d’Urdos ne fonctionne pas, entraînant des chutes de tension entre les deux sous-stations de Bedous et les Forges-d’Abel au milieu des plus fortes pentes de la ligne. À 6 h 45, peu après la sortie du tunnel de Sens, le couplage patine sur les rails couverts de givre. Impossible de sabler les rails, les sablières des deux locomotives sont vides !

Les deux mécaniciens, après avoir placé la rame sous freinage rhéostatique, descendent pour mettre des cailloux du ballast sous les roues. En les écrasant la rame pourrait retrouver son adhérence et repartir. C’est une bonne idée mais la sous-station des Forges-d’Abel disjoncte et, privée de freinage, la rame part en dérive. Les deux agents n’y peuvent rien. Le convoi dévale la ligne. Il repasse devant la gare de Lescun-Cette-Eygun, aborde à plus de 100 km/h le passage à niveau automatique de la route de Lescun qui n’a pas le temps de se fermer et finit sa course dans le gave d’Aspe au pont de l’Estanguet au kilomètre 280,683. Déséquilibré par la vitesse, un wagon accroche la cage de ce pont métallique construit en courbe serrée. Dans un fracas de tôles pliées, l’ouvrage s’effondre avec l’ensemble du convoi. Les dégâts matériels sont spectaculaires mais l’accident n’a pas fait de victimes.

Un accident bien opportun. Aussitôt après l’accident, le transport des voyageurs est assuré par un service d’autocars au départ de Bedous. C’est le Vendredi Saint, avant-veille de Pâques et de nombreux curieux se pressent pendant tout le week-end pour découvrir le pont et le train qui ne sont plus qu’un effroyable amas de ferrailles enchevêtrées.

Facilement accessible et de faible portée, le pont de l’Estanguet aurait pu être remplacé sans difficultés techniques. Le Génie proposa de poser un pont provisoire. Mais la SNCF, arguant d’un déficit d’exploitation annuel de 1,160 MF (aux conditions économiques de 1970) décida de ne rien entreprendre. Elle se contenta de remettre la voie en état jusqu’au pont et de déblayer le gave d’Aspe. Ce fut le début de la fin [provisoire] pour le transpyrénéen…

et toute cette ferraille à cause des économies de bouts de chandelles !

Lettre critique sur l’électrification

Attention à l’économie !

Bonjour,

Ceci est un simple avis sur la désélectrification de la ligne Pau--Oloron.

Comme vous, je souhaite de tout cœur, la réouverture du Canfranc, et j’approuve totalement le travail du CRÉLOC en la matière.

Seule la position que vous avez prise vis-à-vis de la désélectrification me paraît curieuse et extrême :

• Les voies nouvelles ne sont plus équipées en 1 500 V continu certes, mais ce système n’est pas obsolète pour autant : Toutes les lignes des Pyrénées sont équipées ainsi, y compris l’axe Dax--Pau--Toulouse qui voit circuler des TGV. (Beaucoup de grandes lignes en France sont équipées en 1 500 V (Paris--Bordeaux, Paris--Toulouse, Paris--Marseille, Bordeaux--Toulouse…). Il n’est pas concevable de réélectrifier toutes ces lignes en 25 000 V, aussi la gare de Pau sera-t-elle probablement équipée en 1 500 V pour de nombreuses années encore. Donc, quoi qu’il arrive, le matériel desservant le Canfranc devra être apte à circuler sous 1 500 V. C’est-à-dire que même dans le scénario que vous souhaitez, il faudra utiliser un matériel roulant poly-courant. À partir de là, que la transition 1 500 V / 25 000 V se situe à la sortie de Pau ou à Oloron, quelle importance ?

• Le système 25 000 V / 50 Hz a un avantage sur le 1 500 V, c’est qu’il permet de diminuer les pertes en ligne par effet Joule, lorsque d’importantes puissances sont requises.

P = U x I, pour une même puissance P, si on augmente la tension U (25 000 V), on diminue l’intensité I. Et comme les pertes en ligne sont proportionnelles au carré de l’intensité (puissance dissipée par effet Joule = R x I2, R étant la résistance de la caténaire), on réalise ainsi des économies d’énergie).

Donc si la puissance demandée par les engins de traction est faible (et c’est le cas d’une ligne à trafic modéré) un système 1 500 V convient parfaitement. Vous ne pouvez donc pas dire que la remise en état de la caténaire 1 500 V entre Pau et Oloron constitue « un gaspillage d’argent public », ce n’est pas honnête, réélectrifier en 25 000 V coûte beaucoup plus cher pour un gain très discutable.

• En revanche, je suis prêt à parier que ce n’est pas demain qu’on reverra du matériel électrique en gare d’Oloron. Car, si tout est à refaire en matière d’électrification, pourquoi ne pas électrifier prioritairement des lignes diesel où le trafic est beaucoup plus important ? RFF ne va pas s’amuser à électrifier Pau--Oloron tant que des doubles voies importantes comme Lyon--Saint-Germain-des-Fossés ou Bourges-Sincaize ne le sont pas. Il faudra donc encore espérer un fort engagement des collectivités locales pour que cette électrification voit le jour.

Ce que vous n’avez pas réalisé, c’est que la caténaire sur les antennes pyrénéennes, c’est une chance, c’est un héritage historique de la Compagnie du Midi, qui avait alors opté pour l’électrification quasi-intégrale de son réseau, quelle que soit l’importance de la ligne. Le seul moyen de la préserver c’était de s’attacher coûte que coûte au patrimoine existant, et de crier au scandale quand il a été question de refaire circuler des rames thermiques : cette mesure allait clairement à l’encontre du Grenelle, tout ça à cause d’économies de bouts de chandelles… Moi je vous le dis : sans volonté politique locale forte (et sans les moyens qui vont avec), RFF n’électrifiera pas la ligne tant qu’elle n’aura pas prouvé son importance en terme de trafic, autrement dit tant que la liaison transfrontalière n’aura pas été rétablie. Selon moi, votre scénario 25 000 V à Bedous en 2012, c’est une pure utopie. C’est pour toutes ces raisons que j’aurais préféré que vous souteniez la remise en état de la caténaire 1 500 V.

Je sais que ce message ne vous fera certainement pas changer de position, mais je serais déjà heureux s’il vous fait voir les choses de manière moins radicale : car comme vous le présentez, on a l’impression qu’une remise à niveau de la caténaire existante serait un pas en arrière, alors que c’est probablement la seule solution réaliste pour revoir des engins électriques à Oloron à court terme.

Amicalement,

Rémi Saumet